Simple mode pour certains et véritable mouvement culturel et politique pour d’autres, le terme NAPPY est très utilisé de nos jours sur les réseaux sociaux. Cette tendance initiée il y a une dizaine d’années, consiste à assumer ses cheveux crépus en les laissant pousser sans artifice, sans traitement chimique.
Influencé par de nombreux mouvements, Nappy (natural and happy) cache une histoire d’activisme politique et de revendications sociale et culturelle. D’où vient ce mot? Qu’implique vraiment ce qualificatif? Comment devenir nappy?
On vous dit tout dans cet article.
Le néologisme nappy est la contraction de l’anglais natural et happy; il décrit des personnes qui laissent leurs cheveux crépus pousser comme la nature l’entend et portent leurs bouclettes avec fierté.
- Nappy: Un mouvement culturel et politique
Le mouvement nappy est la revendication ethnique aux yeux de la société africaine répartie partout sur le globe. Il est désormais plus question de se lisser les cheveux pour être conforme aux principes de la société moderne formatés par l’Occident. Le pari était de changer le regard des femmes sur elles-mêmes en primauté: Être belle avec les cheveux en nuage.
Juliette Sméralda, sociologue martiniquaise, explique dans son livre « Peau noire, cheveux crépu : l’histoire d’une aliénation » publié en 2005, que « le cheveu crépu est généralement présenté et décrit comme un cheveu malade par les professionnels de la coiffure ».
Dans l’inconscient collectif occidental, souvent intériorisé par les femmes noires, les cheveux afros sont « indisciplinés », « ébouriffés », « rebelles », comme l’expliquent des dizaines d’articles provenant de magazines féminins. Il s’agit donc de « dompter » leur « nature sauvage », de « lisser » sa « crinière de lionne ».
Nappy, inspiré des Black Panthers des années 60 aux États-Unis, ils luttaient pour les droits civiques des afro-américains en arborant leur coiffure afro dans les rues de Californie. Ils inviteront de nombreux afro-américains à faire pareil. L’une des figures les plus dévouées du mouvement Black Panthers, Angela Davis, était reconnue pour sa coiffure afro entres autres motifs, symbole de la culture afro-américaine.

Dans d’autres pays, ce retour naturel n’avait pas de grandes significations politiques sinon des motifs esthétiques et culturels. Le mouvement « nappy » ne serait sans doute jamais apparu sans l’extraordinaire volonté d’une figure de la culture afro-américaine et de l’afro-féminisme, Sarah Breedlove, alias Madam C. J. Walker, qui a été la première femme de couleur à devenir millionnaire en bâtissant au début du XXe siècle un empire commercial dans les produits de beauté pour les femmes noires.
Ce mouvement nappy constitue également le prolongement contemporain du courant « Black is Beautiful », lancé en 1962 depuis Harlem. A l’époque, le peigne « afro » terminé par un poing noir était devenu le symbole de cette affirmation.

2. Effet de mode
Il est un fait indéniable que les cheveux crépus font la une des tapis rouges aux États-Unis. Janelle Monáe, Lupita Nyong’o, Solange Knowles ou Viola Davis, ces stars font couler beaucoup d’encre et ont influencé de nombreuses jeunes filles aux fins d’arrêter le défrisage. On se dit: “Si elles peuvent porter leurs cheveux naturels sur un tapis rouge, je peux certainement me rendre au collège fièrement avec mon afro.”

De plus, l’industrie cosmétique a été très influencée par le mouvement nappy. Les produits sont aujourd’hui beaucoup plus adaptés: des coiffeurs spécialisés, des accessoires et des produits adaptés et même une série autour de la thématique des cheveux naturels crépus sur Netflix, Self Made.
Au Kenya, des ateliers apprennent aux femmes à coiffer leurs cheveux au naturel, tandis qu’au Ghana, des marques de mode ne font défiler que des mannequins nappy. Chez nous, en Haiti des concours de beauté comme Créo’lah7 se font exclusivement avec des femmes aux cheveux naturels.
Le mouvement Nappy fait son chemin et est partie pour rester. En plus, d’une question esthétique, le nappy attaque un problème grave des cheveux, leur santé. Les dangers du défrisage (brûlures, alopécies…) sont nombreux et l’impact sur la santé des femmes ne peut être résolu que par un retour au naturel. Devenir nappy est un choix réfléchi et une exigence culturelle et esthétique.